Comme un frisson... |
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Une fois les portes d’entrée franchies, je découvre la piscine Solvay, son odeur caractéristique de chlore et son aspect austère et vieillot mais propre. Un frisson me traverse le dos. C’est la troisième fois que je mets les pieds dans un bassin de natation et les deux premières fois, à celui de Charleroi, j’avais bu la tasse… Ce même frisson sera au rendez-vous chaque semaine durant toutes les années où je viendrai à Solvay. La peur, l’excitation à la perspective de passer un bon moment de natation, une phobie enfantine ? Je ne le saurai jamais… Une fois dans l’eau chlorée, il n’y a plus de frisson. Plus rien d'autre que la joie d'être là. |
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Adieu piscine... Mai 1975, je termine ma sixième primaire et pour la dernière fois, je viens à la piscine Solvay. Pratiquement jamais durant ces années, je n’ai bu la tasse. Désormais, je sais nager, me voilà capable de le faire sur cent mètres ! J’ai passé les brevets des vingt cinq mètres et des cinquante mètres. Je pourrais passer celui de cent mètres, mais bientôt, ce seront les examens cantonaux et les cours de natation ont laissé la place aux révisions. Adieu le bassin Solvay ! |
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C'était hier... Trente sept ans plus tard, ou presque… J’ai l’impression d’être parti d’ici hier. La piscine est à sec et son carrelage est crasseux de poussière, mais dans ma tête tout revient : les odeurs, les bruits de plongeon, les cris d’enfants qui résonnent, la chaleur. Désaffecté depuis 1998, le vieux bâtiment a plutôt bien tenu le coup. Le crépi jaunasse ne s’est pas détaché des murs des cabines. Ah, ce foutu crépi bien râpeux sur lequel on s’écorchait à la moindre glissade et au moindre faux mouvement ! Il faut dire que le carrelage humide était plutôt glissant et comme on devait laisser ses chaussures et ses chaussettes sur les escaliers avant de gagner les cabines et que l’on courait pour se payer quelques minutes supplémentaires de baignade, on tombait souvent… |
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Je sais nager ! C’est dans cette piscine que j’ai appris à nager. D’ailleurs, nous sommes des milliers à avoir appris à nager ici, au bassin Solvay. Merci à lui et merci à Monsieur Deravet, l’instituteur qui me tenait le menton pour ne pas que je coule et qui me faisait nager comme un petit chien. Un beau jour, je me suis lâché, et puis voilà, je n’ai plus eu besoin de quoi que ce soit pour me tenir la tête hors de l’eau. Et en route vers les mythiques « trois mètres », autrement qu’en se tenant par les mains au rebord du crachoir, là où le chiffre 300 est inscrit en rouge sur le carrelage. Le défi, une fois à la grande profondeur, était de descendre l’échelle qui allait jusqu’au fond du bassin, malgré l’irrésistible force qui tendait à nous repousser vers la surface et la pression de l’eau qui nous vrillait les oreilles. On y arrivait, moyennant une réserve d’air bien calée au fond des poumons. |
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